Ulysse13 a écrit : ↑dim. 31 déc. 2023 19:29
Quant au balade sur la neige, je m'interroge sur vos moyens de repère dans la montagne, est ce que vous connaissez les coins tellement par coeur qu'il n'y a pas de risque de vous perdre, ou est ce que vous suivez au GPS vos évolutions, et si oui avec quelle(s) appli(s)? Sans parler des risques de tomber dans des crevasses ou autres géologies malignes ?
Premier bonsoir de l'année.
Je n'ai pas de GPS cause dépendance aux piles qui n'aiment pas le froid. La boussole, à l'ancienne (couplée avec la carte), c'est un bon élément de sécurité mais plus adaptée aux grandes étendues du type Massif Central ou Scandinavie. En ce qui concerne mon terrain de jeux (Alpes et Jura), mon premier outil c'est la carte IGN que je consulte encore et encore, avant et après. Mon deuxième, c'est la prévision météo pour éviter l'élément le plus critique qui est le brouillard. Mon troisième, c'est ma pratique du terrain puisque la grande majorité des spots kités sont des itinéraires rando ; la montée par ses propres moyens (j'entends avec ses pieds et ses yeux) est la meilleure acquisition des repères et de la topographie. L'avantage c'est que tu peux toujours suivre
ta trace de montée pour redescendre. En revanche, vent + neige + brouillard, c'est le triptyque d'un effacement rapide, dans le plus pur style du Petit Poucet.
Le type de spot est un élément central suivant différents critères (surface, altitude, distance, dénivelée, topographie), doublé des conditions météorologiques comprenant bien sûr la qualité d'enneigement ; le paradoxe étant qu'une neige dure est moins agréable et plus dangereuse pour le snowkite mais qu'elle est plus facile à parcourir en termes d'énergie dépensée. Un autre paradoxe : les grands plateaux du Massif Central paraissent accueillants mais sont de véritables pièges lorsque le brouillard ou le mauvais temps se mettent de la partie (Cf. l'épisode d'un des gars de la KAF qui s'était perdu la veille de la compétition :
https://www.ouest-france.fr/auvergne-rh ... it-7114043).
Pour ma part, quelques exemples de situations vécues pour illustrer le sujet :
Le Grand Saint-Bernard, à 4 et de bons passages brumeux : spot de haute montagne mais avec une topo évidente, soit une combe centrale qui ferme des trois côtés et donc le parking en bas, enfin à quelques kilomètres. Toutefois, il y a un passage supérieur, avec une autre porte de sortie. Notre stratégie est donc de se garder en vue toute la journée et d'avancer en mode reconnaissance avec un kiteur fusible pour les zones dangereuses (trous, ravines, barres rocheuses, turbulence du vent...) :
https://www.onekite.com/topic/14048/col ... -mars-2020
Cenise, spot de moyenne montagne, un plateau avec deux versants, 2 km X 1 km sur la partie principale, enchâssée entre deux montagnes bien évidentes. A force de fréquentation, nos repères sont efficients, on a des points de regroupements et on connaît bien les dangers : dolines, rochers saillants, piquets de clôture. En cas de brouillard, on modère sa vitesse, on suit les traces déjà présentes et on se regroupe toutes les demi-heures environ, de façon presque inconsciente, chacun cherchant à savoir où se trouvent les autres :
https://www.onekite.com/topic/13424/col ... 4121359598
Les Enclaves, à 2, avec l'arrivée du brouillard : spot de haute montagne mais une longue épaule de presque 4 km sur le double de distance pour les vallées opposées. On peut donc se perdre en descendant sur trois côtés ! Spot essayé en 2015 mais réellement tracé dans sa longueur en 2017 en totale découverte, sachant que la porte d'entrée est un itinéraire classique de rando. Un jour en 2020, avec Marc, on va adopter la stratégie du terrier, pour attendre de meilleurs conditions de visibilité. Surtout ne pas naviguer à la voile quand tu n'as plus de repères :
https://www.onekite.com/topic/14038/roc ... 4121359594
Col de Véry, à 4 avec grosse perte de repères cette fois-ci. Véry, c'est un mélange entre Cenise et les Enclaves, plutôt vaste. Ce jour-là, en rando, on traverse une épaisse couche brumeuse pour prendre pied sur la zone kitable. Peu de vent, on se sépare en deux groupes (première erreur !) dont un va chercher si le vent est meilleur sur la crête. Entretemps, le brouillard monte et nous enveloppe tous. Visibilité très réduite. Je décide de longer la crête car je sais qu'il y a un chalet au col, sur lequel je pourrais m'orienter (deuxième erreur). Je ne trouve pas mon repère visuel et en fait d'une ligne droite, nos pas nous guident vers une pente de plus en plus inclinée. Gros moment de doute sur la direction à prendre jusqu'à ce que mon oreille capte un bruit faible mais régulier : ce sont les perches qui cognent à l'arrivée d'un téléski distant à vol d'oiseau de 1700 mètres (Côte 2000) dont je connais le lieu. Je triangule dans ma tête entre le lieu de la séparation d'avec le premier groupe, notre localisation supposée et l'origine du repère acoustique par rapport au vent qui nous rabat le son. Encore 15 mn à avancer, plein d'espoir, j'utilise mon sifflet pour marquer notre présence. Nos deux compères avait eu la bonne idée de ne pas bouger et de faire voler une grosse bâche rouge pour se réchauffer.
Le brouillard à l'attaque, avant de se faire prendre :
Une autre sortie avec un vilain brouillard, du côté des Monts Jura (spot immense mais avec une zone restreinte safe) mais finalement bien gérée grâce à nos couleurs d'ailes, quelques repères et éclaircies fugaces :
https://www.onekite.com/topic/12878/col ... 4121359602
Un dernier aspect, c'est la géologie. Sachant ce qu'il se cache sous nos pieds (lapiaz et gouffres), j'évite, par exemple, d'aller sur le spot des Platières, en haut de Flaine, en début de saison.
Pour se faire une idée des trous, voir le lapiaz à sec :
Et fin mars 2017, la zone ridée :
https://www.onekite.com/topic/12275/d%C ... 4121359606
Petit travail rétrospectif pour moi, je me rends compte qu'il y a aussi des sessions galères mais tant qu'on ne se blesse pas ou pire encore, ça renforce l'expérience. La pire des situations serait du vent fort, pas de visibilité, de la neige dure sur un spot non connu. Ma belle-mère avec laquelle je pratique de la randonnée à ski m'a toujours dit qu'en montagne, au-delà de deux risques objectifs, tu fais demi-tour......